dimanche 12 mai 2013

Ennuyeuses profondeurs




Vous rêvez de visiter les profondeurs abyssales des océans ? Le froid et l'obscurité qui y règnent exercent sur vous une fascination étonnante ? Vous êtes curieux de savoir à quoi ressemblent les créatures monstrueuses qui évoluent dans les grandes profondeurs ? Vous vous êtes toujours demandé à quoi ressemble la vie lorsqu'on est condamné à la promiscuité avec des individus psychologiquement « endommagés » dans une station extrêmement glauque ? Alors Starfish de Peter Watts est fait pour vous.

La société humaine a besoin de toujours plus d'énergie. Une énorme firme entreprend donc d'exploiter l'énergie géothermique sur les failles qui parcourent les fonds des océans. Cependant, cette exploitation nécessite l'envoi d'un personnel très spécifique. La firme en question sélectionne donc des individus au sein de la population et les modifie. Elle les façonne afin qu'ils puissent supporter les conditions d'existence en grande profondeur : elle les dote d'un second système respiratoire, non-aérien, et modifie profondément leur physiologie. Une fois ces changements appliqués, les ouvriers sont envoyés dans les stations sous-marines dispersées au fonds des océans du monde entier. Lenie Clarke est quant à elle envoyée sur la station Beebe. Bien vite, elle se rend compte que ses collègues sont, tout comme elle, psychologiquement endommagés. Et au fil du récit, elle ira de surprises en surprises. Et ces surprises finiront même par représenter une menace pour l'humanité tout entière.

Il m'a fallu beaucoup d'efforts pour terminer la lecture de ce roman. Je me suis ennuyé en lisant les trois quarts de ce livre. La raison de cet ennui ? Watts s'appuie avant tout sur la psychologie de ses personnages. Or, j'ai le sentiment que ce n'est pas ce pour quoi il est le meilleur. Il s'appesantit sur les psychoses et les névroses de ses personnages sans que cela soit palpitant le moins du monde. On a le sentiment que son récit ne se prête pas à ce genre de développement. On attend qu'il nous fasse visiter le fond des océans, qu'il nous fasse rencontrer les prédateurs hideux qui séjournent dans ces profondeurs, qu'il nous explique comment se développe la vie à ces profondeurs. C'est lorsqu'il développe ces points que Peter Watts est vraiment bon. Or, avec Starfish il semble qu'il a décidé de ne nous proposer qu'un roman psychologique. Malheureusement, je pense que Watts n'est pas doué pour ça et même qu'il a tendance à sombrer dans le psychologisme. D'ailleurs, lorsqu'il décide enfin de cesser de s'appesantir sur la psychologie torturée de ses personnages, autrement dit dans la dernière partie du roman, l'auteur déploie quelque chose d'excellent. Il y a une véritable rupture avec le reste du roman car il introduit à ce moment les éléments de hard SF les plus intéressants. On en vient à se demander ce qui l'a empêché de distiller la masse d'informations passionnantes qu'il nous livre dans le reste du récit, au goutte à goutte, plutôt que de nous livrer un paquet indigeste à la fin de son histoire.

On l'aura compris, j'ai trouvé ce roman passablement médiocre. Les descriptions interminables des tourments psychologiques des protagonistes de Starfish m'est passé au-dessus de la tête, non parce que les récits centrés sur la psychologie de leurs personnages ne sont pas à mon goût, bien au contraire. Je pense simplement que le cadre ne se prêtait pas à ce genre d'intrigue et, surtout, que Peter Watts n'a aucun talent dans le domaine de la narration psychologique. Il échoue dans sa mise en scène. L'auteur est pourtant passionnant lorsqu'il parle de l'océan (qu'il connaît parfaitement) et il devient insipide lorsqu'il s'aventure maladroitement sur le terrain de la psychologie. J'ai été passionné par la fin du roman, mais seulement par la fin. On est loin, très loin, de l'écriture d'un Greg Egan qui sait être à la fois passionnant et enrichissant sur tous les terrains, y compris celui de la psychologie. Ceci laisse penser que l'œuvre de Watts aurait peut-être été beaucoup plus agréable si il s'était contenté de la laisser à l'état de nouvelle.

Peter Watts, Starfish, Fleuve Noir, Pocket, 2010.

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